
Emile a 15 ans, il vit en région parisienne. Son père est vendeur en porte à porte, sa mère est femme au foyer et son frère s’est engagé dans l’armée. En apparence, une famille ordinaire, sauf que celle-ci est plutôt extravagante et assez gênante pour Emile. En effet, le jeune homme s’avère être sensible et très peu fier de lui et de sa famille. Au lycée, il croise Pauline, sympathise avec cette jeune fille de bonne famille, qui pratique le violon. Celle-ci invite Emile à Venise, pour assister à un concert. Alors que les parents d’Emile étaient d’accord pour lui acheter un billet de train et le laisser partir seul pour Venise, voilà qu’ils décident de l’accompagner en Italie…par la route.
Second livre de la série « j’achète un premier roman au feeling en librairie « et second coup de coeur ! Et curieusement, comme pour » Les oubliés du dimanche », l’auteur est scénariste !
Alors, il y a quand même une chose qu’il faut dépasser dans ce livre, c’est accepter que ce récit sous forme de journal intime d’un adolescent de 15 ans ne soit pas tout à fait crédible. Je ne parle pas du récit, mais de que dis Emile par rapport à son âge. Lorsque j’avais 15 ans, j’aurais bien été incapable d’avoir le genre de pensées du personnage qui ne fait pas que se regarder le nombril. Il faut dire aussi que l’histoire de Venise n’est pas en Italie se déroule dans une période sans téléphone portable ni Internet…
Il y a plein de niveaux de solitude, la solitude tout seul, accessible à tous, en libre-service, ouverte 24 heures sur 24, mais il y a aussi la solitude à deux, qu’on appelle la vie de couple, je le vois bien quand mes parents se comprennent pas du tout, à quel point ils se sentent chacun comme une île déserte. Et puis bien sûr, celle que je connais le mieux, la solitude entre trois et dix personnes en moyenne, qui s’appelle la vie de famille, une des plus coriaces, parce que pour le couple, il y a des recours juridiques comme le divorce, qui a été créé pour mettre fin à la solitude à deux, mais en ce qui concerne la vie de famille, même devant la Cour de justice européenne, ils peuvent rien pour vous.
Car Ivan Calbérac nous convie à un voyage vers Venise, qui est à fois une petite aventure, une histoire d’amour, une parodie de la vie de famille et une sorte de traité philosophique.
Il y a tout ce qui me plaît dans ce récit : de la tendresse, de l’humanité, beaucoup de drôlerie et de profondeur en même temps. Venise n’est pas en Italie fera le bonheur de beaucoup de lecteurs quel que soit ce qu’ils recherchent ! On s’identifie très vite à Emile en qui on retrouve l’adolescent qu’on a été ou que l’on est toujours si on est attardé comme moi. Et puis les galères en famille, tout le monde connaît ça !
« Le problème , quand on a honte de sa famille,c’est qu’en plus on a honte d’avoir honte. C’est quelque chose entre la double peine et le triple cafard. »
Ivan Calbérac, qui a lui-même adapté son roman en pièce de théâtre, apporte une réelle fraîcheur tout en interpellant son lecteur que les bizarreries de l’être humain et les non sens de la société actuelle.
J’ai adoré ses réflexions et son style, j’ai pensé à Foenkinos parfois mais en plus pétillant.
Bien qu’elle fût devant moi, à un mètre de distance, j’ai eu envie de lui écrire une lettre d’amour, parce que j’adore écrire, j’exprime souvent mieux les choses en les taisant. Les mots sur le papier, c’est du silence qui parle, c’est le début de la poésie.
Les autres membres de la famille sont également bien campés : le père est un genre de doux dingue bruyant qui peut vite se mettre en colère, la mère est une taiseuse qui cache son jeu et fait mal quand elle se lâche.
Mais ma mère c’est un peu comme les divisions qu’on fait à l’école primaire, il manque souvent la retenue. Paraît que c’est un problème mondial, le manque de retenue et de poésie aussi.
Le style de l’auteur est jubilatoire, axé sur la dérision et parfois le burlesque, avec une prédilection pour les aphorismes, ce que j’aime assez dans les romans, du moment qu’il y a une vraie histoire et que l’auteur ne se contente pas de noter ses pensées sur un carnet.
En résumé, un moment de lecture parfait ou presque que je vous recommande chaudement !
Et France Culture a adoré aussi…alors là tout fout le camp…j’ai pas compris !
Pour ceux qui ont souffert de solitude toute leur vie, c’est peut-être une solution intéressante, la fosse commune, avoir de la compagnie pour l’éternité, ça se refuse pas.

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